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L’observation des lahars

On a gardé des souvenirs empiriques des lahars de la rivière du Prêcheur depuis fort longtemps, de plus ou moins grande intensité, en période d’éruption du volcan ou pas. Mais les épisodes récents semblent être les plus violents jamais observés depuis que les dispositifs scientifiques ont été mis en place. Alors, est-ce que la Montagne Pelée est en train de se réveiller ? Comme semble le croire une partie de la population. C’est l’observatoire volcanologique et sismologique de la Martinique, dit Observatoire de la Montagne Pelée qui est chargé de la surveillance du phénomène. Il rend compte régulièrement de ses observations à la population, sous forme de bulletins trimestriels ou de communiqués.

 

Le dernier lahar de grande ampleur avait eu lieu en 2010 et selon la directrice de l’Observatoire, Valérie Clouard, « On ne sait pas encore pourquoi ce phénomène est plus important que tous ceux observés jusque-là. Beaucoup de paramètres restent encore à étudier ».

Selon le site de l’Observatoire, « Les lahars peuvent se produire à tout moment dans la vie d’un volcan, y compris comme en Martinique lorsque le volcan est au repos. Ils sont en général associés à la pluviométrie sur le sommet, mais dans certains cas particuliers, ils peuvent se produire sans pluviométrie majeure du fait d’exsurgence d’eau provenant des nappes phréatiques comme c’est le cas occasionnellement dans la falaise Samperre ». Grâce à ses réseaux de surveillance, l’Observatoire a enregistré depuis le début de cet épisode, début janvier 2018, 639 glissements de terrain au niveau de cette falaise, responsables des coulées de boue. Plusieurs millions de m3 se sont déjà effondrés et personne ne peut dire aujourd’hui quand cela va s’arrêter !

Pour autant, l’Observatoire ne fait aucun lien entre ce phénomène et un éventuel réveil de notre volcan…Valérie Clouard rassurante affirme : « Non, la montagne ne se réveille pas. On peut vous garantir que le volcan est actuellement en repos profond, il n’y a aucun paramètre qui pourrait laisser penser le contraire…Avant qu’il y ait une manifestation de surface, il faut que le volcan soit alimenté en magma et on peut détecter ça avec nos observations longtemps avant une éruption. On sait qu’on est tranquilles pour quelques années. »

Quant à l’influence éventuelle, sur le phénomène de lahar au Prêcheur, de la riche activité volcanique et sismique dans les Petites Antilles ces derniers temps (pas moins de six volcans actifs parmi nos plus proches voisins et de nombreux séismes), là non plus, selon la directrice de l’Observatoire « aucun lien ne peut être établi dans l’état actuel des connaissances scientifiques ».

Reste que la population prêchotine est sur le grill depuis deux mois avec des alertes de sirènes intempestives indiquant un épisode de lahar éminent et donc un potentiel danger, souvent précédé de tremblements de terre comme l’affirment les témoins. «  Ce ne sont pas de séismes, les gens entendent et ressentent les vibrations des gros glissements de terrain et des éboulements de matières. » Explique la scientifique. « C’est vrai que la population est mise à rude épreuve. Elle a été bien informée et tout le monde sait quoi faire mais la fréquence des alertes est insupportable, leur répétition porte sur les nerfs…D’ailleurs, nous cherchons à changer le seuil d’alerte, à affiner la surveillance pour gérer une crise longue, ce que nous n’avions jamais connu. Nous devons trouver l’instrumentation adéquate et pour cela nous recherchons des financements », poursuit-elle. Actuellement, c’est un système d’alerte automatique basé sur des seuils de données. Une fois que l’alerte est lancée, quand la sirène sonne, une coulée de boue, quelle que soit son importance, peut survenir entre 10 à 30 minutes au niveau du bourg du Prêcheur. L’Observatoire cherche à affiner les seuils d’alerte.

Une prochaine mission scientifique viendra prochainement, apporter son renfort dans les recherches, à l’équipe de l’Observatoire, qui elle aussi, en tant que seule référence scientifique d’observation, doit être sous pression.

Nathalie Laulé

 

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