La pollution plastique contamine tous les recoins de notre planète. Pour lutter contre ce fléau, des idées concrètes fleurissent un peu partout dans le monde, sur terre comme sur mer. Petit tour du monde des initiatives les plus marquantes.

Un million de bouteilles en plastique sont achetées chaque minute dans le monde, selon l'ONU, mais des alternatives existent.
Un million de bouteilles en plastique sont achetées chaque minute dans le monde, selon l’ONU, mais des alternatives existent. © Radio France / Julien Mougnon

À l’occasion de la journée #PlastiqueNonMerci organisée par France Inter avec Konbini le 27 mars, coup de projecteurs sur les initiatives mises en oeuvre dans le monde entier par des associations, des entreprises, et des citoyens pour lutter contre cette pollution massive. De l’assiette comestible inventée en Pologne, et qu’on peut déjà acheter en France, au #TrashtagChallenge en Algérie, mille idées fleurissent à travers le monde, plus ou moins anecdotiques, plus ou moins pérennes.

En Pologne, une usine fabrique des assiettes à manger, plutôt qu’à jeter

C’est l’innovation qui pourrait remplacer l’assiette en plastique pour vos pique-niques, festivals et autres barbecues cet été. L’assiette en son de blé, conçue par l’entreprise polonaise Biotrem, est aussi à usage unique, sauf qu’elle finira dans votre estomac, plutôt que dans la poubelle. 

Produite dans une usine au nord-est de la Pologne, cette vaisselle biodégradable et comestible est déjà en vente dans plusieurs pays européens, y compris en France, ainsi qu’aux États-Unis. On peut même la trouver à la cantine du Ikea polonais.

En Allemagne, du dentifrice en pastille

Plus d’un milliard de tubes de dentifrice se retrouvent dans nos décharges chaque année. Très difficiles à recycler, une entreprise allemande a tout simplement décidé de nous en débarrasser. Fini le tube, fini la pâte à dents. L’entreprise vend des pastilles, conditionnées dans des bocaux en verre 

Il suffit de mordre dans ces pastilles à la menthe fraîche, puis d’humidifier sa bonne vieille brosse à dents, et il ne reste plus qu’à frotter !

Dans le Sahara, des abris de réfugiés fabriqués en bouteilles de plastique

L’idée vient d’un ingénieur né dans un camp de réfugiés sahraouis qui ont fui les combats de la guerre du Sahara occidental il y a plus de 40 ans. Après ses études, Tateh Lehbib Breica est revenu à Tindouf, dans le désert du sud-ouest de l’Algérie, pour construire des abris, à partir de milliers de bouteilles en plastique, remplies de sable et de paille. Dès 2017, 25 habitations avaient déjà été construites.

Venu d’Algérie, le #TrashtagChallenge est devenu viral

Le principe est simple : sur une plage, sur les bords d’une route ou encore d’une rivière envahis par les déchets, les participants se prennent en photo sur le lieu recouvert d’ordures, pour ensuite le nettoyer. Des quatre coins du monde, les avant/après ont inondé les réseaux sociaux.

À l’origine de ce challenge écolo devenu viral, un algérien de 27 ans,Younes Drici Tani, originaire de Tlemcen, dans le nord de l’Algérie. Depuis plusieurs années, le militant écologiste organise déjà des collectes de déchets et des actions de sensibilisation.

Un jour, il lance un défi : le #Younes_Can_Challenge dans sa ville. Un an plus tard, relayé par un américain sur Facebook, c’est devenu le #Trashtagchallenge.

Au Mexique, des maisons en plastique recyclé à bas prix

Depuis deux ans, la société mexicaine EcoDom fabrique des maisons écolos en un temps record. Ces habitations sont construites en plastique recyclé : les déchets sont collectés ou achetés auprès de petites entreprises, déchiquetés, puis fondus pour devenir des panneaux. 

À Istanbul, une bouteille en plastique contre un ticket de métro

L’expérimentation a été engagée l’année dernière par la municipalité de la capitale turque. En échange d’une bouteille en plastique ou d’une canette introduites dans un distributeur, la carte de transport des usagers est créditée de trois centimes de livres turques par déchet.   

En Grande-Bretagne, des étudiants ont inventé l’eau en bulle

C’est une alternative étonnante à la bouteille que proposent trois designers : stocker l’eau dans un bulbe gélatineux, créé à partir d’algue marine comestible et biodégradable. Si vous avez une petite soif, il suffit de percer la membrane pour en faire sortir le liquide. On peut aussi gober la bulle, baptisée Ohoo

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La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible d’en confectionner dans sa propre cuisine, comme l’explique l’un des co-fondateurs de la start-up londonienne. Pour ça, il faut de l’alginate de sodium, du lactate de calcium et de l’eau bien entendu, comme l’explique un youtubeur dans cette vidéo.

En Espagne, une marque vend du plastique fashion

La marque Ecoalf, fondée en 2009, a lancé le projet “Upcycling the Oceans”. Elle fabrique des habits à partir de déchets récupérés dans l’océan par des milliers de volontaires, pêcheurs espagnols et thaïlandais. Les filets de pêche et les déchets, en particulier les bouteilles en plastique, sont transformés en flocons pour obtenir des filaments de polyester. Blousons, sweats, baskets… 

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Les vêtements 100 % recyclés sont ainsi confectionnés avec un objectif affiché par le président-fondateur, Javier Goyeneche : “fabriquer la première génération de produits de mode à partir de matériaux recyclés de même qualité, même design et mêmes propriétés techniques que les meilleurs produits non recyclés”. La première boutique a été ouverte à Madrid, en 2012, puis une seconde à Berlin. Depuis quelques mois, la marque a fait son entrée aux Galeries Lafayette, à Paris.

Au Brésil, on joue au volleyball avec du filet de pêche recyclé

Le projet “Good net” a déjà été mis en oeuvre sur une plage de Copacabana de la capitale brésilienne. Désormais, les ballons s’échangent au dessus d’un filet de pêche recyclé. La _”Fondation de pêche fantôme” (_Ghost Fishing Foundation) et la Fédération internationale de volleyball (FIVB) espèrent ainsi lutter contre le phénomène des “filets fantômes” : des filets abandonnés dans les océans qui piègent les animaux marins.  

Les filets de pêche seraient le type de déchet plastique le plus mortel : 46 % du vortex de détritus du Pacifique nord (la plus grosse accumulation de déchets plastiques dans l’océan, située entre Hawaï et la Californie) seraient constitués de ces filets, selon une étude publiée dans Scientific Reports.

Dans le canal d’Amsterdam, il y a des péniches qui collectent

C’est une croisière un peu particulière proposée à Amsterdam et Rotterdam par Plastic Whale. Munis de filets, près de 23 000 touristes ont déjà visité les deux villes néerlandaises, tout en collectant 202 000 bouteilles en plastique flottantes, depuis le lancement de l’activité en 2011. 

Une fois repêché dans les canaux, rivières et ports, c’est le début d’une nouvelle vie pour ce plastique, réutilisé pour construire de nouveaux bateaux de croisière qui serviront eux aussi à récupérer des déchets. Le patron, Marius Smit, a également décidé de collaborer avec la société Vepa pour en faire des meubles éco-responsables.

Au Ghana, on fabrique des routes en plastique

À Accra, la capitale ghanéenne, l’entreprise Nelplast transforme les sacs plastiques en asphalte, afin d’en faire des pavés pour les routes et les trottoirs, ainsi que des tuiles. Après l’annonce de l’interdiction des sacs plastiques par le gouvernement en 2017, l’ingénieur Nelson Boateng est parti d’un constat dans son pays : seuls 2 % des déchets plastiques produits seraient recyclés chaque année

Les déchets amassés par tonnes autour de la capitale sont collectés, fondus puis mélangés uniquement avec “du sable recueilli dans les systèmes de drainage”, décrit le directeur de la société

En Islande, une bouteille biodégradable à base d’algue

Et si nos déchets à usage unique disparaissaient d’eux-mêmes ? Ari Jonsson, un étudiant islandais en design, a créé une bouteille d’eau biodégradable. Elle est fabriquée à base de poudre d’agar-agar, une algue marine utilisée comme gélifiant naturel en cuisine, mélangée avec de l’eau. Lorsqu’elle est pleine, la bouteille bio se solidifie. Alors qu’une bouteille en plastique peut mettre jusqu’à dix siècles à se désagréger, celle-ci, une fois vidée, se décompose… À moins qu’il ne vous prenne l’idée de la dévorer.

En France, la Charente-Maritime a aussi son inventeur de bouteilles 100 % végétales : Nicolas Moufflet, directeur de l’entreprise Lys Packaging à Saintes. D’habitude, il vend des bouteilles en plastique. Désormais, il commercialise davantage de bouteilles biodégradables, réalisées à partir de déchets de canne à sucre.

En Jamaïque, une poubelle de mer nettoie le port

Lancé par deux surfeurs australiens, le Seabin Project a d’abord été testé en France, à La Grande-Motte, Marseille et Paris. Depuis octobre 2018, il a investi les eaux du parc marin de Montego Bay, une ville sur la côte nord de l’île. 

Les déchets sont aspirés vers l’entrée de la poubelle flottante sous l’effet d’une pompe électrique qui crée un courant dans l’eau. Jusqu’à 1,5 kilos de débris plastiques, de deux millimètres minimum, peuvent être captés chaque jour. 

En Egypte, un artiste met le plastique en musique

Avec son organisation, Rabab Luxor Art Collective, Shady Rabab s’est rendu dans le bidonville de Kibera, au Kenya. Primé par l’ONU en tant que “jeune champion de la Terre” pour l’Afrique, le recycleur mélomane leur apprend comment transformer les ordures en instruments de musique.

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D’une simple bouteille en plastique, il crée une flûte ou des maracas. Le musicien écologiste de 28 ans veut réunir les enfants ramasseurs d’ordures de Louxor, au Sud de l’Egypte, en un “Conservatoire de musique d’ordures”.

Au Kenya, un voilier traditionnel conçu à partir de tongs

C’est un navire traditionnel, appelé dhow, construit sur l’île de Lamu, au Kenya. Les 9 mètres de sa coque sont recouverts de milliers de tongs récupérées sur les plages et les bords de routes kényans. Dix tonnes de plastique fondu puis compressé… et ça flotte. L’année dernière, le voilier, baptisé Flipflopi, a navigué sur plus de 500 kilomètres, du Kenya vers la Tanzanie. 

Une expédition en guise de sensibilisation sur la pollution plastique des côtes est-africaines qui fait écho à l’interdiction de l’utilisation, l’importation et la fabrication des sacs plastiques, décidée au Kenya en 2017.

Dans les océans, des navires nettoyeurs

Le plus célèbre s’appelle Ocean Cleanup. Le premier prototype a été déployé dans la mer du nord, en 2016. 100 mètres de véritable barrière contre le vortex de déchets du Pacifique nord, à 23 kilomètres des côtes néerlandaises. En utilisant les courants océaniques naturels, et sous l’effet du vent et des vagues, les ordures sont concentrées et emprisonnées à l’intérieur du flotteur. En dessous, un filet retient les micro-plastiques. Le tout est régulièrement évacué par un navire pour rapporter le plastique à terre et le recycler.

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Autre “bateau éboueur” en projet, Le Manta, du nom des raies qui filtrent elles-mêmes naturellement l’eau. Lancé par le navigateur Yvan Bourgnon, il est destiné à récolter les déchets avant qu’ils ne se détériorent en petites particules. Ils doivent ensuite être compactés pour être stockés dans les cales. Le navire devrait prendre le large en 2023 pour sillonner les côtes.

Pour le Plastic Odyssey, actuellement en chantier, l’expédition devrait démarrer en 2020, pour un voyage de trois ans le long des côtes d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie-Pacifique. Particularité de ce catamaran : il sera propulsé au “plastique”. Les déchets plastiques non-recyclables extraits de l’océan seront broyés, stockés et convertis en carburant.

En Australie, les déchets plastique pris dans les filets

Les autorités de la ville australienne de Kwinana ont décidé de prendre le problème à la source. Elles ont installé un système de filtration dans la réserve de Henley. Des filets piègent les déchets plastiques à la sortie des tuyaux de drainage des eaux provenant de zones résidentielles, avant même qu’ils ne se jettent dans les rivières et les océans.

Dès le premier essai de six mois en 2018, près de 400 kilos de déchets ont été récupérés. Lorsque les filets sont pleins, ils sont retirés et les ordures sont transportées vers un centre de tri.

Au Sénégal, troquer sa poubelle contre de l’argent

Bouteilles, bidons, bouchons et autres pots de yaourts… Un kilo de plastique peut rapporter 75 Francs CFA, quelques centimes d’euros. C’est le groupe Proplast qui rachète ces déchets. Une fois pesés et récupérés, ils sont acheminés vers une usine de transformation pour devenir des produits du quotidien, dont certains sont revendus dans les kiosques de collecte.

Environ 1 800 tonnes de plastique auraient été échangées dans un peu plus de 60 points de collecte qui ont déjà vu le jour dans le pays, depuis le lancement du concept “Recuplast“, en 2015.

Au Québec, des boîtes à sacs réutilisables

Dans un quartier de Montréal, les étourdis qui ont oublié leur sac réutilisable pour faire leurs emplettes peuvent désormais en trouver dans la rue. Des “boîtes à partage” ont été installées par un organisme québécois de développement commercial, pour éviter que les consommateurs ne se reportent sur des sacs à usage unique ou rachètent de nouveaux sacs réutilisables. 

La plupart d’entre nous avons plusieurs sacs dans nos voitures. Et quand nous faisons les courses, nous les oublions la plupart du temps”, explique la porte-parole Laurence Laplante.

Et si on faisait disparaître le plastique ?

C’est une découverte accidentelle faite par des chercheurs américains et britanniques qui suscite beaucoup d’espoir. Une enzyme mutante qui décompose le plastique polytéréphtalate d’éthylène (PET), le plus communément utilisé. Alors que la décomposition naturelle de ces déchets peut prendre des siècles, il ne faudrait que quelques jours à cette “enzyme gloutonne” pour réaliser le même processus. “Ce que nous espérons, c’est utiliser cette enzyme pour transformer ce plastique en son composant d’origine, afin que nous puissions le recycler en plastique, explique le professeur John McGeehan, cela signifie que nous n’aurons plus besoin de récupérer du pétrole.” 

En France, l’entreprise Carbios, basée à Clermont-Ferrand, se prétend précurseure dans le développement de cette technologie. Son premier prototype lancé en février dernier permettrait de recycler 200 kilos de PET en seulement 16 heures.

In https://www.franceinter.fr/